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On en parle
Ne lui dites surtout pas que sa vie ressemble à celle de ses personnages... Emily Blaine (son nom de plume) refuse catégoriquement qu'on la compare à ses héroïnes. « Ma vie est beaucoup plus calme et je suis moins tourmentée qu'elles », répond-elle poliment quand on ose le parallèle. Cadre à la SNCF le jour, auteur de romances pour la collection Harlequin le soir, cette femme de 36 ans est pourtant en passe d'intégrer le club très fermé des auteurs de « best-sellers ». Ses livres se sont vendus à plus de 300 000 exemplaires en quatre ans.
Révélée par la série Dear You en 2014, confirmée, depuis, par le succès de chacun de ses nouveaux titres, huit à ce jour, Emily Blaine est aujourd'hui considérée, par les amatrices du genre, comme « la Barbara Cartland à la française ». La comparaison la fait sourire. « Mais elle est juste », glisse son éditrice Karine Lanini. De fait, les bluettes d'Emily Blaine transportent leurs lectrices dans le même univers de rêve que celui de la romancière britannique, disparue en 2000 à l'âge de 98 ans après avoir publié 724 livres, vendus à plus d'un milliard d'exemplaires.
Parcours sans faute
Née à Saint-Brieuc dans un milieu modeste (sa mère travaille à l'abattoir local et son père est transporteur routier), le parcours d'Emily a de quoi faire rêver. La Bretonne, devenue parisienne au moment de ses études, n'a pas seulement réussi à intégrer l'une des directions du plus grand groupe ferroviaire européen, elle s'est, en parallèle, fait un nom dans le domaine de l'édition.
« Tout a commencé par un concours, organisé par Harlequin en 2012. Concours auquel ma meilleure amie qui savait que j'écrivais depuis plusieurs années m'a inscrite sans me prévenir », raconte Emily Blaine. À cette occasion, son premier manuscrit (Passion sous contrat) est repéré par le comité de lecture d'Harper Collins, propriétaire des éditions Harlequin. La maison lui propose aussitôt de la publier. « J'ai été d'autant plus surprise que je n'étais pas totalement satisfaite par cette histoire (une secrétaire qui tombe amoureuse de son patron, NDLR) », confie-t-elle. Le livre paraît en mai 2013. Le public répond présent immédiatement.
Dear You est, à ce jour, le plus grand succès d'Emily Blaine. Ce roman a pour décor: le Peninsula, un palace new-yorkais Kathleen y travaille à l'accueil. Transparente pour la plupart des clients, elle tape dans l'oeil d'Andrew Blake. Mais il n'est pas le seul à l'avoir repérée... © DR
« J'avais dans mon tiroir un gros manuscrit qui me tenait davantage à cœur. Je pensais qu'il était impubliable, car il faisait plus de mille pages. Je l'ai apporté à mon éditrice qui m'a aussitôt dit oui en me proposant juste de le faire paraître en trois tomes », poursuit-elle. Ce sera la trilogie Dear You. L'histoire de Kathleen (une célibataire endurcie qui travaille dans un palace et doit choisir entre trois prétendants) lui gagne un lectorat fidèle. Construit sous la forme d'un échange épistolaire et suivant la progression d'une enquête policière, ce deuxième opus confirme l'essai et place Emily Blaine en orbite. Il faut dire que cette série répond parfaitement au cahier des charges de la romance : avec un happy end en forme de feu d'artifice.
Des bluettes contre le blues
Cette contrainte, Emily Blaine l'assume parfaitement. « Mes livres sont avant tout faits pour donner du plaisir à mes lectrices. Je veux qu'elles en ressortent avec la pêche », affirme la pétulante romancière. Et il semble que la formule fonctionne si l'on en juge par la file d'attente de jeunes femmes enthousiastes qui se forme devant son stand à chacune de ses séances de signature. Entretenant un lien très étroit avec la communauté de lectrices qui la suit de livre en livre (« chaque dimanche, je passe une partie de ma matinée à répondre à mes mails et à mettre à jour ma page Facebook et mon compte Twitter », dit-elle), Emily Blaine est une stakhanoviste de l'écriture. Elle publie ainsi, depuis 2014, un à deux ouvrages par an.
Un tour de force quand on sait que cette jeune femme est, par ailleurs, mère de deux enfants. « Mais j'ai un mari formidable », glisse-t-elle, dans un sourire. « Sans lui, je ne parviendrais pas à mener ces deux vies professionnelles de front », assure-t-elle. « Nous avons une organisation bien rodée. Elle dépose les enfants le matin. Je les récupère en fin d'après-midi et m'occupe d'eux le soir », indique Jean-François (c'est son deuxième prénom), fonctionnaire au ministère de la Défense. Que pense-t-il des livres de sa femme ? « Pour être totalement honnête, je n'ai jamais réussi à aller jusqu'au bout. C'est très bien écrit, mais moi je préfère la science-fiction et la bande dessinée », évacue-t-il avec une franchise désarmante.
Deuxième chance
Dans Si tu me le demandais, sorti en octobre, le héros (Cooper) est accablé par le poids du chagrin après la mort de sa femme. Lorsqu’il recroise, par hasard, une ancienne connaissance (Julianne), il va reprendre goût à la vie. © DR
Cet automne, Emily Blaine a publié un nouveau roman: Si tu me le demandais. Écrit en sept mois, après l'heure du dîner et le coucher de sa fille et de son garçon (respectivement 7 et 9 ans), cet ouvrage raconte la vie d'un veuf, Cooper, qui se laisse dépérir jusqu'à ce qu'il rencontre Julianne. « J'y évoque la possibilité de connaître une deuxième histoire d'amour très forte même après un drame », résume Emily.
« Très souvent, les romances s'arrêtent au premier amour qui est censé être l'unique. Or, il existe une deuxième chance et c'est cela qui m'intéressait ici », poursuit la romancière qui s'affranchit volontiers des canevas attendus (trop de romances revisitent, à son goût, les contes d'enfant). Chez elle, l'homme n'est pas forcément un prince ou un milliardaire. Et elle prend un soin particulier à faire de ses héroïnes « des personnages indépendants. Elles doivent avoir du répondant », martèle-t-elle. Une manière de défendre les droits des femmes, selon elle.
La recette du succès
Son prochain livre est déjà annoncé pour les fêtes. Il sera en prévente sur les sites de vente en ligne à partir du 29 novembre. « Noël est une période favorable pour publier de la romance », analyse Emily Blaine. Intitulé Tout en haut de ma liste, il racontera le destin entremêlé de trois couples qui se retrouvent après de longues années. « Je l'ai écrit pendant l'été au bord de la piscine. Il y avait quelque chose d'étrange à décrire la neige qui tombait (l'histoire se passe en décembre) alors qu'il faisait 40 °C à l'ombre », se rappelle Emily Blaine. Mais la romancière pense déjà à sa prochaine aventure. « Je vais reprendre des personnages secondaires de Toi, moi, maintenant ou jamais. Mes lectrices me demandaient ce qu'ils étaient devenus. J'ai bien envie de le leur raconter », indique-t-elle.
« Contrairement à ce qu'on pense, Harlequin ne m'impose aucun canevas préétabli. Je suis absolument libre ! » assure la romancière qui déclare jubiler à l'idée de placer des embûches sur le chemin de ses personnages. « Je sais très bien qu'ils parviendront à surmonter tous les obstacles pour parvenir au bonheur », s'amuse-t-elle, reconnaissant ainsi que la marque de fabrique d'une romance réside dans le fait que « le monde peut s'effondrer autour des héros ; eux s'en sortiront toujours ».
Un parfum d'Amérique
Ses intrigues, de belles factures, regorgent de coups de théâtre. Ils s'illustrent surtout par des dialogues plein d'humour. Comme toujours, ses personnages portent des noms à consonance anglo-saxonne et vivent aux États-Unis. « Peut-être parce que je regarde beaucoup de cinéma américain. Mais la vérité, c'est que le cadre importe peu », émet Emily Blaine qui a, elle-même, choisi son pseudonyme à partir d'un personnage secondaire d'une série américaine. Pour autant, la jeune femme n'a jamais mis les pieds outre-Atlantique ! « J'irai un jour; mais pour l'heure je voyage grâce à Google Map », plaisante-t-elle.
Son éditrice s'amuse de ce tropisme américain. « Il brouille les pistes, car de nombreux lecteurs pensent qu'elle n'est pas française ou, du moins, qu'elle vit là-bas », émet Karine Lanini. Cela n'empêche pas l'agent américain Grégory Messina, en charge des auteurs du groupe Harper Collins, de la présenter comme « la reine de la romance à la française ». Une étiquette qui fait tilt chez de nombreux éditeurs étrangers. Lors de la dernière Foire internationale du livre de Francfort, des maisons d'édition allemandes, italiennes, espagnoles, portugaises et brésiliennes ont ainsi manifesté un grand intérêt pour le travail d'Emily Blaine", poursuit Grégory Messina.
Un zeste de sexe
Le secret d'Emily Blaine réside peut-être dans le parfum d'érotisme qui flotte sur la plupart de ses ouvrages. « Je n'aime pas trop écrire les scènes de sexe, mais comment parler d'amour sans évoquer son aspect charnel ? » interroge la romancière. Elle s'y attelle donc avec comme seule consigne de ne jamais verser dans la vulgarité. « Ça a un côté un peu patinage artistique. Ça peut déraper à chaque instant. C'est vraiment casse-gueule... Il y a l'aspect technique, avec les figures imposées qu'il faut savoir conjuguer avec l'aspect artistique et les émotions des personnages. Mais cela peut aussi être drôle et élégant », évoque-t-elle. Une manière d'envisager la chose qui plaît beaucoup hors de nos frontières. « Ils appellent ça : l'amour à la française », émet son attachée de presse, Clémence Seibel.
[caption id="attachment_905" align="alignnone" width="850"] Originaire d'Hillion, elle vit désormais en région parisienne. Depuis 2013, elle collabore avec Harlequin. Son nouveau titre, Toi .Moi. Maintenant ou Jamais vient de sortir[/caption]