Toi. Moi. Maintenant ou Jamais. Episode 2
*** Attention SPOILER : à ne pas lire si vous n’avez pas encore lu l’épisode précédent ! ***
Pourquoi lutter contre le destin ?
Elle l’a revu. Elle a revu Jérémiah. L’espérait-elle ou le craignait-elle ? Cela n’a plus d’importance, désormais. Il est toujours aussi beau, il l’est même davantage. Et leur attraction, cette inexplicable force qui les relie l’un à l’autre, est toujours aussi présente. Il l’a invitée à prendre un café – enfin, « invitée » façon Jérémiah : elle n’a pas vraiment eu le choix. Un rendez-vous qu’elle redoute profondément, car Jérémiah voudrait qu’elle lui accorde une seconde chance. Pour Charlotte, se remettre avec lui serait insensé, définitivement inenvisageable : ils sont bien trop différents, et rien n’a réellement changé depuis leur séparation. Mais, si elle est si sûre d’elle, pourquoi appréhende-t-elle autant ce nouveau face-à-face ?
104 pages
On en parle
Le jour, elle travaille à la SNCF, où elle organise des formations pour les manageurs. Le soir, elle écrit des histoires d'amour passionnel pour Harlequin. En moins de quatre ans, Emily Blaine est devenue l'auteur française phare de l'éditeur de romances. Elle a vendu 170 000 ouvrages et publié près de 30 titres. Ces jours-ci, elle publie une nouvelle fiction en plusieurs épisodes, intitulée « Toi. Moi. Maintenant ou jamais ». Derrière ce pseudonyme se cache une femme de 35 ans, drôle et pimpante, mariée et mère de deux enfants de 5 et 7 ans.
« Emily » a commencé à écrire il y a sept ans, lorsqu'elle s'ennuyait pendant son premier congé maternité. « Je ne trouvais pas de livres qui me plaisaient, se souvient-elle. Alors je me suis mise à écrire ce que j'avais envie de lire. » Sur Internet, la jeune femme se lance dans les « fan fictions », ces récits dérivés de romans célèbres. Comme l'auteur de « 50 Nuances de Grey », elle s'inspire notamment de « Twilight ». Fin 2012, lorsqu'une de ses amies lui conseille de participer à un concours qu'organise Harlequin, elle se laisse convaincre juste avant la date limite. Elle envoie un texte intitulé « Passion sous contrat » et tape dans l'œil de l'éditeur.
Son ouvrage est publié et on lui réclame de nouveaux textes. « J'ai dû l'annoncer à mon mari. Il ne savait pas que j'écrivais parce que je le faisais quand il jouait aux jeux vidéo ou regardait le foot. Il a dit C'est comme « 50 Gris » ? » La jeune maman choisit alors son nom de plume (« Mon mari a trouvé Emily et moi Blaine en épluchant la liste des personnages de New York, unité spéciale »). Depuis, celle qui a grandi à Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor) entre une mère qui « bosse dans une usine » et un père chauffeur-livreur enchaîne les romances à un rythme impressionnant.
Pour écrire, Emily Blaine part d'une idée et d'un cadre qui la font « fantasmer ». Elle n'a jamais mis les pieds aux Etats-Unis, mais a situé sa série « Dear You » à New York. « J'écrivais avec Google Maps sous les yeux. » Ses personnages sont « soit beaux, soit riches » : « On ne fait pas rêver avec un plat de coquillettes. Quand les femmes regardent Dirty Dancing, elles savent bien que, dans la vraie vie, Patrick Swayze n'aurait jamais craqué sur cette nénette. » Le plus difficile pour elle reste d'écrire une scène de sexe. « Là aussi, il faut faire rêver, mais cela doit rester réaliste : l'homme n'a pas quatre jambes ni trois bras... » Pas question pour autant de reculer devant l'obstacle. « Quand il n'y a pas de sexe, les lectrices font un scandale », rigole-t-elle.
La légendaire maison d'édition de romances publie ces jours-ci les nouveaux livres de son auteur française, Emily Blaine. L'éditeur a su se renouveler depuis sa création en 1949 au Canada.
Il a « raté » les deux cartons de ces dernières années, « 50 Nuances de Grey » de E.L. James et « After » d'Anna Todd (publiés chez JCLattès et Hugo). Pourtant, l'éditeur Harlequin, né au Canada en 1949 et débarqué en France en 1978, reste la référence au rayon romance. L'an dernier, il a vendu 4,4 millions de livres en France, dont beaucoup de traductions et il doit éditer en 2016 quelque 500 nouveautés dans l'Hexagone, dont, ces jours-ci, les nouvelles histoires de son auteur tricolore, Emily Blaine. Pour entretenir la flamme, Harlequin applique de vieilles recettes, tout en sachant se renouveler
La romance, c'est du sérieux
« La littérature de genre obéit à des cadres », explique Karine Lanini, directrice éditoriale déléguée chez Harlequin. Ainsi, les romans Harlequin racontent toujours une histoire d'amour qui paraît impossible, par exemple parce qu'elle rassemble des personnages que tout oppose, mais qui va se réaliser. Les sentiments doivent être intenses et l'univers « fantasmatique ». Les personnages sont très beaux et souvent très riches. Et le sexe dans tout ça ? « C'est secondaire », jure Karine Lanini. Qui confie cependant que les lectrices sont « déçues » s'il n'y en a pas.
Chacun ses goûts
Les lectrices peuvent trouver chaussure à leur pied parmi les vingt-six collections de Harlequin : ceux de la ligne Azur se déroulent dans le monde du luxe, les Historiques font voyager dans le temps, les Spicy ( NDLR : « épicé »)sont des romances érotiques, les Black Rose mêlent amour et suspense, les Blanche mettent en scène des médecins « irrésistibles, courageux, charmeurs et sexy »... Tout est fait pour que les lectrices sachent à quoi s'attendre et ne soient pas déçues.
L'amour à tout prix
Des livres à partir de 4,30 EUR, des e-books, livres numériques, à partir de 3,49 EUR, trois romans pour 7,40 EUR, « un livre offert pour un livre acheté »... Harlequin applique une politique de prix très offensive. Sur le site Harlequin.fr, on peut même s'abonner à une série et recevoir 4 à 9 livres par mois. Harlequin revendique 10 000 abonnées français.
A la page
Quand une tendance débarque sur le marché, Harlequin se met au garde à vous. Après le succès de « Twilight », l'éditeur s'est engouffré dans la brèche de la romance paranormale avec loups-garous et vampires. Après le phénomène « 50 Nuances de Grey », il a fait la part belle aux pratiques sadomasochistes. Et après le carton de la série « After » d'Anna Todd, c'est la vague du « new adult » qui a été investie, soit les romances qui mettent en scène des personnages âgés de 18 à 22 ans vivant des relations explosives.
Des french lovers
Jusqu'en 2013, Harlequin publiait quasi exclusivement des auteurs anglo-saxons. Il y a trois ans, l'éditeur décide d'organiser des concours pour recruter des plumes françaises. C'est comme cela qu'il a découvert sa nouvelle star Emily Blaine (voir ci-contre), mais aussi d'autres comme Angéla Morelli ou Gilles Milo-Vaceri. Publier français, c'est notamment une façon de mieux maîtriser la production et de créer des liens entre les auteurs et les lectrices à travers les pages Facebook, les forums et les séances de dédicace.
De l'amour virtuel
Ces livres made in France sont d'abord vendus sous format numérique et seuls certains d'entre eux paraissent ensuite en format papier. Cela permet à Harlequin de multiplier les paris sur de nouveaux auteurs sans prendre trop de risques financiers. Tous les autres livres Harlequin sont eux aussi disponibles en e-book. Le numérique représente d'ailleurs 23 % du chiffre d'affaires de l'éditeur -- contre seulement 6 % chez l'ensemble des éditeurs français.
Cupidon en perfusion
Harlequin publie certaines séries comme des feuilletons. C'est le cas pour « Toi. Moi. Maintenant ou jamais » d'Emily Blaine : les deux premiers épisodes sont parus en e-book le 15 juin (le premier étant gratuit), le troisième le 22 juin et chaque semaine jusqu'au 13 juillet verra la parution (toujours en numérique) d'un nouvel épisode. « C'est une littérature très addictive », souligne Karine Lanini pour justifier ces offres. Pour attiser le désir, Harlequin sait qu'il ne faut pas trop se faire attendre.
A quoi ressemblent les romans Harlequin en 2016 ? Voici quelques extraits.
« Le pot de moutarde suédoise, souvenir d'une très lointaine visite chez Ikea, regardait fixement Emilie du fond de l'étagère. Le problème, c'est qu'il était tout seul : le frigo était vide. [...] Si l'on ajoutait à ça le fait que sa vie sexuelle ressemblait à un poème de Victor Hugo (« Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ») et qu'elle était à court de Coca Light, autant dire qu'il y avait vraiment de quoi soupirer. »
(Extrait de « l'Homme idéal » d'Angéla Morelli).
« Il ne devait pas avoir plus de 30 ans, et son sourire était éblouissant. Le haut de sa chemise légèrement ouvert laissait apparaître la pilosité de son torse, son cou et le dessin carré de ses épaules. »
(« Dear You 1 » d'Emily Blaine).
« Je reculais légèrement, me heurtant à la porte derrière moi et Dan en profita pour insinuer sa langue entre mes lèvres. Je le laissai faire, me laissant emporter par la sensation de son corps chaud contre le mien. »
(« Dear You 1 » d'Emily Blaine).
« Il étreint mes hanches et j'écarte les jambes sans attendre qu'il me le demande, cette fois. Alors, il me prend et je laisse ma tête retomber contre son torse, délicieusement étourdie. Du bout des doigts, il commence à décrire des cercles diaboliques autour de mon sexe, au même rythme que ses coups de reins. »
(« Leaving Amarillo » de Caisey Quinn)